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Les mangeurs de lard et de misère du fort William

février 9, 2015

Voyageurs hivernants et mangeurs de lard

Groupe de comédiens incarnant des voyageurs, Fort William. Source : Parc Historique du Fort William

Groupe de comédiens incarnant des voyageurs, Fort William.
Source : Parc Historique du Fort William

Comme la rivière est profonde à son entrée, la Compagnie a fait construire des quais le long du fort, pour l’attérage des goëlettes qu’elle entretient sur le Lac Supérieur, soit pour transporter ses pelleteries du Fort-William au Sault-Sainte-Marie, ou des marchandises et des vivres du Sault-Sainte-Marie au Fort William. Les terres sont défrichées derrière le Fort et des deux côtés. Nous y vîmes de l’orge, des pois, et de l’avoine, qui avaient une très belle apparence. Le cimetière se trouve à l’extrémité du défrichement. Il y a aussi, de l’autre côté de la rivière, un certain nombre de maisons toutes habitées par de vieux voyageurs canadiens, usés au service de la Compagnie, sans en être devenus plus riches. Ces hommes, mariés à des femmes du pays, et chargés de familles nombreuses, aiment mieux cultiver un peu de blé d’Inde et de patates, et faire la pêche, pour subsister, que de retourner dans leur pays natal, donner à leurs parents et à leurs anciennes connaissances, des preuves certaines de leur inconduite, ou de leur imprudence.

Fort William, 1892 Source : City of Thunder Bay Archives.

Fort William, 1892
Source : City of Thunder Bay Archives.

Le Fort William est l’entrepôt principal de la Compagnie du N.O. dans les Pays-Hauts, et le rendez-vous général des associés. Les agents de Montréal, et les propriétaires hivernants, s’y réunissent presque tous, chaque été, pour recevoir les retours, former les expéditions, et discuter les intérêts de leur commerce. La plupart s’y trouvaient lors de notre arrivée. Les engagés hivernants qui descendent, passent aussi une partie de l’été au Fort William : ils forment un grand campement à l’Ouest, en dehors des palissades. Ceux qui ne s’engagent à Montréal que pour aller au Fort William ou au Lac la Pluie, et n’hivernent pas, occupent un autre espace, au côté Est. Les premiers donnent à ces derniers le nom de Mangeurs de lard. On remarque entre les deux camps, qui se composent quelquefois de 3 et 400 hommes chacun, une différence étonnante : celui des mangeurs de lard est toujours fort sale, et celui des hivernants, propre et décent.

Source : Fort William Historical Park

Source : Fort William Historical Park

Pour défricher ses terres et améliorer ses propriétés, la Compagnie a soin d’obliger tous ceux qui s’engagent à elle, comme canotiers, à lui donner chacun un certain nombre de journées de corvée. C’est ainsi qu’elle a fait défricher et consolider les environs du Fort William. Mais quand un engagé a travaillé ce nombre de journées, il en est pour toujours exempt, quand même il resterait 20 et 30 ans dans les pays sauvages, et descendrait au Fort tous les étés.

– Tiré de Gabriel Franchère, Relation d’un voyage à la côte du nord-ouest de l’Amérique Septentrionale, dans les années 1810, 11, 12, 13, et 14, Montréal, L’Imprimerie de C.B. Pasteur, 1820, p. 270-272.

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