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Vers des écoles secondaires publiques de langue française

August 24, 2015

Statuts de l'Association canadienne-française d'éducation d'Ontario (ACFEO). Source : Université d'Ottawa, CRCCF, Fonds Association canadienne-française de l'Ontario (C2), C2/384/2.

Statuts de l’Association canadienne-française d’éducation d’Ontario (ACFEO). Source : Université d’Ottawa, CRCCF, Fonds Association canadienne-française de l’Ontario (C2), C2/384/2.

Le développement de l’enseignement secondaire en Ontario français prend une tournure inattendue durant la deuxième moitié des années 1960. Depuis sa création en 1910, l’Association canadienne-française d’éducation d’Ontario ( (ACFEO) réclame l’établissement d’écoles secondaires confessionnelles de langue française. N’ayant pas obtenu ce droit, les Franco-Ontariens ont développé un système d’écoles secondaires catholiques privées. Or, au début des années 1960, ces écoles privées ne peuvent plus soutenir la concurrence des écoles secondaires publiques. De nombreuses écoles privées doivent fermer leurs portes. Il existe bien quelques écoles secondaires publiques à majorité franco-ontarienne, mais le réseau public offre des programmes d’enseignement élaborés pour des élèves anglophones.

Créée en 1965, l’Association des écoles secondaires privées franco-ontariennes estime, en 1966, qu’il est temps que les élèves franco-ontariens aient accès à des écoles secondaires polyvalentes confessionnelles de langue française. Cependant, le problème confessionnel semble un obstacle aux yeux de plusieurs dirigeants franco-ontariens.

Photo : Roger-N. Séguin et Roger Charbonneau (secrétaire général de l'ACFO de 1946 à 1973); à l'arrière plan, Henri Charbonneau, Ottawa, 1963. Source : Champlain Marcil, Le Droit. Tirée de Université d'Ottawa, CRCCF, Fonds Association canadienne-française de l'Ontario (C2), Ph2-318.

Photo : Roger-N. Séguin et Roger Charbonneau (secrétaire général de l’ACFO de 1946 à 1973); à l’arrière plan, Henri Charbonneau, Ottawa, 1963. Source : Champlain Marcil, Le Droit. Tirée de Université d’Ottawa, CRCCF, Fonds Association canadienne-française de l’Ontario (C2), Ph2-318.

En août 1966, le Premier ministre de l’Ontario, John Robarts (** voir en bas), annonce l’intention de son gouvernement d’établir un régime d’écoles secondaires publiques de langue française. En février 1967, le président de l’ACFEO, Roger Séguin, demande aux délégués du congrès spécial de l’ACFEO d’étudier la possibilité de créer des écoles secondaires de langue française qui ne seraient pas confessionnelles. De son côté, la Fédération des associations de parents et instituteurs de langue française de l’Ontario (FAPI), fait partie des organisations franco-ontariennes qui réclament des écoles secondaires publiques de langue française.

En mars 1967, l’ACFEO présente un mémoire demandant l’établissement d’un régime d’écoles secondaires franco-ontariennes publiques auquel seraient associées les écoles secondaires privées de l’Ontario français. De son côté, Mgr Joseph Aurèle Plourde, archevêque d’Ottawa, donne l’appui de l’épiscopat franco-ontarien au projet d’établissement d’écoles secondaires publiques de langue française. Le Premier ministre John Robarts répond à cette demande en créant, le 24 novembre 1967, un Comité sur les écoles de langue française de l’Ontario sous la présidence de Roland Bériault. Rapidement, le mandat de ce comité est élargi pour englober l’ensemble des écoles fréquentées par les élèves franco-ontariens.

Photo : Roland Bériault, président du Comité sur les écoles de langue française en Ontario, 1971. Source : Université d'Ottawa, CRCCF, Fonds Fédération des caisses populaires de l'Ontario (C93), Ph187-1136. / Studio C. Marcil.

Photo : Roland Bériault, président du Comité sur les écoles de langue française en Ontario, 1971. Source : Université d’Ottawa, CRCCF, Fonds Fédération des caisses populaires de l’Ontario (C93), Ph187-1136. / Studio C. Marcil.

En 1968, le Comité provincial sur les buts et objectifs de l’éducation dans les écoles de l’Ontario (Commission Hall-Dennis), publie les résultats de trois années de recherche dans son important rapport « Vivre et apprendre ». Le rapport recommande que le ministère de l’Éducation élabore des programmes d’études à l’intention des élèves franco-ontariens où le français est la principale langue d’enseignement et l’anglais est enseigné comme une langue seconde. Publié également en 1968, le Rapport Bériault, fortement imprégné des principes mis de l’avant par le Rapport « Vivre et apprendre », jette les bases d’un véritable système scolaire de langue française de l’élémentaire au secondaire en Ontario. L’adoption de la loi sur l’administration des écoles (loi 140) et de la loi sur les écoles secondaires et les conseils scolaires ( loi 141) permet, en 1968, la création d’écoles secondaires de langue française. Dès lors, les hauts fonctionnaires francophones du ministère de l’Éducation de l’Ontario étudient la situation de l’enseignement secondaire en français en Ontario.

En 1969, le premier réseau d’écoles secondaires de langue française est constitué à partir d’un noyau de six anciennes écoles secondaires « bilingues » publiques et de 16 anciennes écoles secondaires franco-ontariennes privées.

Texte tiré du site Web du Centre de recherche en civilisation canadienne-française.

Photo : John P. Robarts. Source : R. Olsen / Toronto Star.

Photo : John P. Robarts. Source : R. Olsen / Toronto Star.

** Lors du congrès de l’Association canadienne des éducateurs de langue française, tenu à Ottawa le jeudi 24 août 1967, le premier ministre ontarien, John P. Robarts, déclare qu’« il faut de toute urgence offrir une éducation secondaire dans la langue de la communauté franco-ontarienne ». M. Robarts précise que son gouvernement s’engage à créer, « dans le cadre du système d’éducation publique de l’Ontario, des écoles secondaires dans lesquelles l’enseignement sera donné en français ». Le discours est prononcé en anglais, sauf pour un court passage où M. Robarts clame, en français, que l’Ontario est « plus riche et plus fort grâce à la présence de ces résidents de langue française ». Il brosse un tableau de la situation en 1967 : environ quarante écoles publiques secondaires offrent des cours d’histoire, de latin et de géographie en français ; il y a aussi des écoles privées où le français est la langue d’enseignement. Le politicien souligne qu’un nombre anormal de jeunes franco-ontariens abandonnent leurs études avant de terminer leur cours secondaire et qu’environ 10 000 jeunes franco-ontariens suivent leurs cours dans des écoles où l’anglais est la seule langue d’enseignement. « Nous ne pouvons pas permettre qu’une telle situation se perpétue », ajoute-t-il. John Robarts, qui fut ministre de l’Éducation avant de devenir premier ministre, précise que les écoles secondaires françaises feront partie intégrale du système d’éducation public existant et qu’elles recevront automatiquement la même aide financière que les autres écoles secondaires.

Texte : Jean Yves Pelletier